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Le Droit de l'Entreprise

DROIT DE L'INTERNET
La légalisation prochaine des jeux d'argent et de hasard en ligne
Publié le 26/03/2009
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Actuellement, les jeux d'argent et de hasard sont, en France, strictement réglementés. L'offre légale en matière de loterie, de paris sportifs, de paris hippiques et de jeux de casino est, en pratique, entre les mains de quelques sociétés agréées par l'État français (la Française des jeux, le PMU et quelques sociétés exploitant légalement des casinos) [1].

Mais à côté de cette offre légale - qui investit, peu à peu, le réseau Internet, mais avec du retard sur les acteurs de l'Internet - une offre massive en langue française s'est développée depuis le début des années 2000, offre généralement illégale dès lors qu'elle propose, sur le réseau Internet, des loteries, jeux d'argent et paris à des résidents français. Cette offre parallèle illégale s'est développée à grande vitesse, de telle sorte qu'environ 75 % des mises d'argent sur le réseau Internet s'effectuent sur des sites Web exploités par des entreprises qui ne sont pas agréées par l'État pour exercer une telle activité [2].

En présence de cette situation de fait, l'État a souhaité encadrer le marché des jeux et paris sur l'Internet, notamment à fin de contrôler les opérateurs et moraliser cette profession.

Il s'agit notamment de contrôler l'offre de jeux aux mineurs, de limiter les risques d'addiction ou, plus généralement, de dépendance aux jeux d'argent, de limiter les risques de triche et de fraude et de protéger l'intégrité des compétitions sportives et hippiques ainsi que leur éthique [3]. Cette légalisation aura pour avantage également de recueillir quelques recettes fiscales supplémentaires.

Cette légalisation s'inscrit en outre dans un contexte européen, la Commission européenne ayant adressé à la France, le 18 octobre 2006, une lettre de mise en demeure sur sa législation en matière de jeux d'argent et de hasard. Le 10 mars 2009 le parlement européen a adopté une résolution « pour relever les défis que posent les jeux d'argent et les paris traditionnels et en ligne », soulignant notamment « l'importance de la coopération face à la lutte contre la fraude et la criminalité ».

Quels jeux et paris en ligne sont concernés ?

Le dispositif prévu par le projet de loi ne concerne pas tous les jeux d'argent et paris sur le réseau Internet.

Le projet de loi ouvre la concurrence à trois secteurs qui intéressent un très grand nombre de joueurs et qui sont considérés comme n'étant pas les plus « addictifs » (cette appréciation pourrait, toutefois, être discutée en ce qui concerne le poker en ligne) :

  • les paris hippiques,
  • les paris sportifs,
  • les jeux de casino.

Les paris hippiques pourront, selon le projet de loi, être autorisés « selon leur forme actuelle », à savoir dans le cadre de paris mutuels tels qu'ils sont organisés par le PMU.

Rappelons-nous qu'actuellement le PMU dispose d'un monopole légal en matière d'organisation des paris relatifs aux courses de chevaux en application de la loi du 16 avril 1930 (article 186), modifiée en 1964 et du décret n° 97-456 du 5 mai 1997 modifié par le décret numéro 2-1346 du 12 novembre 2002.

Ainsi, les sites de pari hippique non agréés par l'Etat sont a priori illégaux, quand bien même les « bookmakers » seraient-ils installés hors du territoire français, dès lors qu'ils s'adressent à des joueurs français [4] [5].

Dans le nouveau dispositif, les sites de paris hippiques pourront être agréés si les opérateurs proposant de tels paris contribuent au financement de la filière équine, ce afin d'éviter qu'une grande partie des sommes d'argent correspondant aux paris échappe à cette filière. Ainsi, une redevance sur les mises, d'un niveau fixé actuellement à 8 %, sera mise en place (soit un total de fiscalité de retour aux filières de 15,5 % en y ajoutant la fiscalité étatique et la taxe « sécurité sociale »).

Les nouveaux opérateurs ne pourront, en revanche, toujours pas organiser des paris hippiques dans « le monde physique ».

Les paris sportifs sur le réseau Internet seront également légalisés, tout en étant encadrés.

Les paris sportifs (à savoir essentiellement « Loto foot » et « Cote et match » [6] sont actuellement le domaine réservé de la Française des jeux, que ce soit dans le réseau physique des distributeurs ou sur le réseau Internet.

Le projet de loi prévoit d'ouvrir à la concurrence des autres opérateurs les paris sportifs sur l'Internet dans la mesure où ceux-ci réunissent un certain nombre de conditions.

La légalisation concerne à la fois les paris « à cote » et les paris mutuels. S'agissant des paris « à cote », rappelons qu'une proposition de loi a été déposée à l'Assemblée Nationale le 7 mai 2008 et qui « vise à interdire toute forme de paris à cote fixe sur les événements sportifs » [7], ce afin d'éviter les dérives observées outre Manche et outre Atlantique.

Les opérateurs agréés devront notamment financer, à hauteur de 1 % des mises, le centre national pour le développement du sport (CNDS) et subir un taux de prélèvement de 7,5 % (totale de la taxation revenant à l'État et de la taxe de sécurité sociale), soit un total de fiscalité de retour aux filières de 8,5 %.

Certains jeux de casino sur le réseau Internet seront ouverts à la concurrence tout en étant également encadrés.

Le dispositif prévu par le projet de loi prévoit la légalisation des « jeux de cercle » en ligne. Cette autorisation concerne essentiellement le poker en ligne ou les jeux apparentés, qui sont considérés comme moins « addictifs » que les machines à sous [8].

Les jeux « de table », à savoir notamment le blackjack et la roulette ou les jeux similaires de casino, pour lesquels le hasard a une part prépondérante et qui sont également considérés comme de nature à favoriser les addictions, demeureront illégaux s'ils ne respectent pas la réglementation actuelle des casinos.

Si le secteur des jeux de cercle en ligne est ouvert à la concurrence, leurs conditions d'exploitation demeurera strictement encadrée (plafonnement des mises, plafonnement de l'approvisionnement du compte joueur, plafonnement du solde du compte joueur, indication du temps passé à jouer, indication des pertes durant la session de jeu, etc.).

Les conditions d'agrément des nouveaux opérateurs

Les candidats opérateurs devront obtenir une « licence » pour une durée de cinq ans renouvelables, accordée pour l'une des trois activités susvisées.

Pour obtenir cette licence, les opérateurs devront respecter :

  • les clauses générales (applicables aux trois secteurs d'activité)
  • ainsi que les clauses spécifiques à chaque activité,

d'un cahier des charges générales, rédigé par l'autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL), dans lequel seront précisées les conditions de nature à :

  • protéger les personnes vulnérables,
  • assurer la transparence,
  • garantir la solidité financière des opérateurs,
  • garantir la régularité des opérations de jeux,
  • garantir la fiabilité ainsi que la traçabilité des données de jeux,
  • lutter contre le blanchiment d'argent et la fraude.

Le nouveau dispositif légal prévoit également que les nouveaux opérateurs soient installés dans l'espace économique européen et qu'ils donnent accès à toutes les données techniques et financières indispensables au contrôle du respect des cahiers des charges.

Le contrôle des conditions d'agrément

L'ARJEL, qui délivrera l'agrément, aura autorité pour réguler le secteur des jeux sur l'Internet et aura également autorité pour retirer l'agrément si un opérateur ne respecte pas les clauses générales et spécifiques du cahier des charges.

En pratique, les candidats opérateurs devront, pour obtenir leur licence, constituer un dossier d'agrément décrivant leur structure, leur programme d'activité, ainsi que l'ensemble des mesures mises en œuvre - et les moyens pour les mettre en œuvre - afin de respecter les clauses du cahier des charges établi par l'ARJEL.

La contrepartie de la légalisation partielle des jeux et paris sur l'Internet : le renforcement de la pénalisation des sites illégaux

La contrepartie de la légalisation des jeux et paris en ligne dans les conditions qui viennent d'être rappelées consiste en un renforcement des interdictions et de la pénalisation :

  • de l'organisation illégale des jeux sur l'Internet,
  • de la publicité pour des services de jeux et paris en ligne illégaux,
  • ainsi que le blocage des transactions bancaires et de l'accès aux sites illégaux.


[4] Cour d'appel de Paris, Zeturf, 4 janvier 2005

[5] CJCE, Gambelli, 6 novembre 2003, retenant que si une réglementation nationale qui intérêts qui, sous peine de sanctions pénales, l'exercice d'activités portant sur des paris sportifs en l'absence d'autorisation délivrée par l'État constituent une restriction à la liberté d'établissement et à la libre prestation de services prévus aux articles 43 et 49 du traité CE, « il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si une telle réglementation, au regard de ses modalités concrètes d'application, répond véritablement aux objectifs susceptibles de la justifier et si les restrictions qu'elle impose apparaissent pas disproportionné au regard de ses objectifs ».

[8] http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2008-2009/20090118.asp (Réponse à la question n° 485 de Mme Delaunay)

Pascal ALIX
Avocat à la Cour



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